L'une des armes possibles contre le
totalitarisme est, on le sait depuis longtemps, l'humour. Ce n'est
pas une arme de destruction massive, non. Plutôt un moyen de créer
des fissures et de les creuser, en attendant que le système se
désintègre de lui-même.
Un petit royaume jamais nommé, que les
Nazis ont envahi sans ménagement pour le « protéger » :
c'est là que se situe « l'Heure du roi ». Les mœurs les
plus simples y règnent ou plutôt y régnaient ; le roi avait
accoutumé de sortir seul à cheval, de saluer ses sujets qui le
respectaient naturellement pour ce qu'il était : un honnête
homme, soucieux de son devoir, pénétré de l'idée du bien commun.
D'ailleurs, ce roi était aussi chirurgien urologue et exerçait
régulièrement ses talents dans une clinique de bonne réputation.
Le bruit des bottes de la Wehrmacht
vient changer tout cela. Une violence gratuite et sanguinaire fait
son apparition ; elle laisse la population et le roi lui-même
comme hébétés, incrédules devant des humains si peu pétris
d'humanité. Un tel royaume n'est pas bâti pour résister. Hormis la
garde du roi, qui tente un geste héroïque et désespéré,
immédiatement écrasé dans le sang, le Pays ne résiste pas. Des
tempéraments si doux peuvent inspirer la confiance des tyrans et
servir à leurs fins. C'est ainsi que le roi, au titre de ses
compétences de chirurgien, va être appelé à soigner le Führer
lui-même.
Mais l'humiliation a des limites. Si
les Juifs deviennent des sous-hommes, alors les hommes, quels qu'ils
soient, tous les hommes dignes de ce nom doivent tenir à honneur de
se proclamer juifs à la face du monde et de l'oppresseur. Le roi ne
saurait manquer à cette obligation morale. Il le paiera de sa vie,
sans que l'on sache ce que devient son royaume. Il n'y a pas de
morale à cette histoire. Ou bien si : celle de la conscience
irréductible, qui doit se dresser face à la violence
institutionnalisée, non par bravade mais simplement parce qu'on ne
doit pas accepter la destruction de certaines valeurs. Quoi qu'il en
coûte.
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