mercredi 12 octobre 2011

Solaire, de Ian McEwan

Sous ses apparences d’homme souriant, courtois et policé, Ian McEwan est un écrivain au scalpel. On l’a bien vu à l’œuvre dans Samedi, et, plus subtilement encore, dans Sur la plage de Chesil.
L’auteur s’appuie sur une documentation solide, complétée par de multiples échages avec des spécialistes : la liste des remerciements en fin de volume en témoigne s’il en était besoin. Dans Samedi il était beaucoup question de neurologie ; Solaire évoque plutôt, comme son nom l’indique, les questions des changements climatiques et des énergies du futur.
Michael Beard, le protagoniste de ce roman, est à la fois un scientifique de renom et un homme à femmes. Ce n’est pas incompatible. Dans son jeune temps, il a fait une découverte importante : la colligation de Beard-Einstein. Il a été récompensé par le Prix Nobel de physique. Bien entendu, nous ne saurons pas grand-chose du détail de cette avancée scientifique – puisque aussi bien elle est purement imaginaire. Ce qui est certain, c’est que depuis lors Beard n’a pas fait grand-chose d’autre que percevoir les dividendes de sa célébrité. Il est le nom connu qui vient cautionner des colloques, conférences, centres de recherche.
Célèbre, mais sans scrupules, notre Prix Nobel s’empare sans vergogne des découvertes d’un jeune chercheur. Il est vrai que celui-ci couche avec sa femme, mais est-ce une raison ? La véritable raison, ce serait plutôt l’objet de ses travaux : la photosynthèse artificielle, qui permet de créer de l’énergie non polluante à partir de la seule lumière du soleil, comme le font les plantes. Grâce à elle, Beard vieillissant va accéder à une notoriété bien supérieure à celle que lui a value son Prix Nobel, d’ailleurs quelque peu oublié entre-temps. A la condition toutefois que ses problèmes privés, son dernier divorce et l’assassinat supposé d’un des amants de sa femme par l’autre, auquel il est mêlé, ne le rattrapent pas…
Non, ce livre ne fait pas vraiment rire. L’humour de l’auteur est plutôt sarcastique et grinçant. Ce qu’il provoque relève essentiellement de la grimace. Personnage assez pitoyable, Beard agit comme un révélateur de la misère relationnelle et conjugale de notre époque aussi bien que de l’histrionisme de la vie publique (qu’il s’agisse du monde politique ou scientifique, c’est tout un). Ian MacEwan enfonce très profond son scalpel dans la chair sociale et ses doigts ne tremblent pas.

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