Pourquoi l’auteur, manifestement écrivain des villes, décide-t-elle tout à coup de devenir une femme des champs ? Pourquoi la Parisienne, tout à coup, se fait-elle Provinciale ? De ce choix de vie, nous ne saurons rien ou presque. Le hasard d’une maison que l’auteur visite et qui lui « parle » (les maisons parlent parfois, ou ne pourrait-on dire plutôt qu’elles s’accordent à un certain discours que l’on tient sur soi-même et en soi-même) y est sans doute pour quelque chose. Mais peut-on appeler hasard le hasard et surtout celui-là ?
Certitude, en revanche : ce changement, peut-être à cause de la plus grande solitude qu’il provoque, entraîne un retour sur soi. La mère de Lorette Nobécourt aurait dû se faire avorter ; elle était déjà en route pour la Suisse quand le froid extérieur l’a fait changer d’avis. Se remet-on d’exister quand en principe on n’aurait pas dû ? Pour elle, le monde est mensonge et elle développe un eczéma qui dénonce cette fausseté, met le réel à nu. Au sens figuré comme au sens propre, Lorette Nobécourt est une écorchée vive. Tout est intense chez elle : les moments de vie, d’émotion, de contemplation autant que l’angoisse ou la douleur qui parfois la ravagent. Elle en parle dans une prose à la fois lumineuse et tranchante, si peu bavarde parfois qu’elle en devient obscure (obscure et non pas mystérieuse). Mais l’on s’attache facilement à ce que cette femme encore jeune mais plus tout à fait novice dans la vie nous dit d’elle-même, de ce qu’elle aime et de ce qui lui fait mal. On s’y attache pour plusieurs raisons sans doute ; mais, personnellement, j’en placerai une au-dessus de toutes les autres : Lorette Nobécourt ignore la désinvolture, ce ragout bon marché d’égoïsme et de laisser-aller.
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